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Interview de Pascaline Hervéet, par J Touron, 2000 ?

jeudi 29 octobre 2009, par Lyonic

Tiré de : http://missalzheimer.free.fr/interv...
L’original a été publié dans le magazine "Fanfare" de Clermont-Ferrand

Les Elles ne ressemblent à personne. Leurs mélodies insidieuses gazouillées par la voix de Pascaline écorchent le cœur. Leurs paroles, cruelles et enfantines, dépeignent un univers onirique et troublant qui confine parfois au cauchemar, tant il est proche d’une réalité trop souvent sordide. En trois albums, elles ont su conquérir les éloges de la presse indépendante et un public enthousiaste, même si quelques uns des fans de la première heure se sont laissés désorienter par le côté technoïde de leur troisième production, Pamela Peacemaker. Un album-concept qui tourne autour de la vie d’une infirmière américaine aux cheveux rouges, amatrice de rêve et de rave.

Rencontre avec Pascaline Herveet, chanteuse du groupe, auteur (autrice ?) des textes et compositrice (compositeur ?) des mélodies.

Êtes-vous satisfaites de votre parcours ?
C’est un beau parcours, et c’est surtout une belle rencontre avec un public. C’est vrai qu’on a été pas mal boudées par les médias,surtout au début, mais il s’est vraiment passé un truc avec un public qui grandit de plus en plus : c’est la plus belle récompense. Les médias sont finalement moins importants que les rencontres ; je suis beaucoup moins sensible à ce qui est dit dans la presse, que ça soit positif ou négatif, qu’à un bon ou un mauvais concert, dont l’effet peut être beaucoup plus perturbant.

Nouvelle maison de disques, nouvelle formation, nouveaux sons et nouveau concept : le troisième album est placé sous le signe du changement. Révèle-t-il une volonté de marquer un tournant dans votre carrière ?
La maison de disques n’est qu’un outil logistique, et j’avais envie sur cet album de moyens financiers beaucoup plus importants. Le changement de formation n’est probablement pas le dernier, c’est simplement une histoire qui évolue... Ce que j’aime bien dans ce métier, c’est l’aventure : essayer des choses, faire des rencontres, mélanger des personnalités... Au bout de quatre ans de la même formation, ça devenait moins rigolo, moins perturbant pour le public comme pour nous, donc on est repartis à zéro.

Au départ, vous étiez quatre filles. L’une d’entre vous, Sarah Auvray, est partie : que s’est-il passé ?
Moi j’avais d’autres envies musicales et c’est bien qu’elle trace sa route : elle chante, elle est comédienne, elle a beaucoup de talents.

Vous avez donc intégré deux hommes dans le groupe. Était-ce pour révolutionner la grammaire française, ou pour qu’on arrête de vous qualifier de "groupe de filles" ?
C’était pour qu’on arrête de dire qu’on est un groupe de filles ! On avait monté ce groupe avec l’envie de faire des choses à plusieurs, pas forcément avec des filles. Le problème, c’est que ça a été tout de suite mis en avant par les médias, avec, en plus, un petit côté féministe qui ne nous convient pas du tout. Le féminisme ne m’intéresse pas et ne correspond pas du tout à ce que j’ai envie de revendiquer. Maintenant, c’est clair puisqu’il y a des hommes. Je sais que certaines personnes le déplorent, ce n’est pas grave si celles-là n’aiment plus Les Elles. Par contre, je peux comprendre les gens qui nous reprochent le côté un peu électronique, je peux comprendre qu’on n’ait envie d’écouter que de l’acoustique. C’est un choix artistique.

Tout l’album tourne autour de l’infirmière Pamela Peacemaker. Physiquement, elle te ressemble beaucoup ! Paméla, c’est toi ?
Non ce n’est pas moi, même si j’y ai mis des choses à moi. Ce que j’aime dans ce métier, c’est de pouvoir jouer sur scène comme un enfant dans sa chambre. Ca fait partie du jeu d’avoir les cheveux rouges parce que j’ai envie d’être Pamela sur scène, mais je ne m’y trompe pas encore. Le personnage est né il y a deux ans, je ne sais pas trop comment. Je m’y suis attachée. Une infirmière incarne à la fois un fantasme et une réalité très dure, j’aime bien ce mélange. J’aime le monde de l’hôpital, comme tous ces endroits où les gens sont fragilisés par la vie et la douleur. En général il s’y passe des choses humaines exceptionnelles : c’est cet aspect-là qui m’intéresse, pas du tout le côté glauque.

Donner la parole aux exclus, comme tu le fais dans beaucoup de tes chansons, c’est important pour toi ?
Ce n’est pas important mais naturel, dans le sens où ce sont ces gens-là qui m’intéressent. Ce n’est pas un effort de ma part, en tant que chanteuse. Dans ma vie, ce sont ces gens-là qui m’attirent et avec qui je partage le plus de choses.

Sons électroniques, raves, X... tu te sens concernée par le phénomène techno ?
Mon premier technival a été une expérience forte. C’est très agréable de se retrouver comme ça dans un lieu privilégié où on peut faire ce qu’on veut. On sent vraiment que la marginalité est complètement naturelle. Et en même temps c’est complètement désespéré, parce que ces marginaux qui essaient de vivre autre chose dans leur monde se renferment complètement sur eux-mêmes. Je trouve ça touchant et beau. Il n’y avait pas eu de mouvement aussi fort depuis longtemps. Je n’ai pas été très sensible au rock parce que je trouvais que ça s’évaporait au cours des années et que ça n’avait plus de sens. L’aspect choc, provocation, qui était intéressant au départ, avait été perdu. On le retrouve avec la techno. Cette musique emmène un vrai mouvement, un véritable état d’esprit qui perturbe, choque, et amène à se poser plein de questions.

La provocation est importante pour toi ?
Elle est vitale ! La provocation, c’est ce qui fait avancer les choses. Cette envie de faire écouter de la musique électronique, de situer l’action de l’histoire aux States et d’introduire des paroles en anglais révèle-t-elle une volonté de sortir du carcan de la " chanson française " ? Oui ! Moi j’ai fait de la chanson française parce que je suis française : c’était naturel, mais ça s’arrête là. Je n’ai pas du tout envie de me retrouver dans le côté traditionnel et presque rétro de cette musique, ce n’est pas ce qui m’intéresse. Même si ce que je fais correspond à de la chanson réaliste, je n’ai pas envie de chanter comme Edith Piaf, j’ai envie de créer ma propre chanson. C’est vrai qu’il y a toute une vague d’artistes en chanson française qui sont très branchés accordéon et qui n’en démordent pas. Pour moi, ils deviennent des caricatures de chanteurs français. Je n’avais pas envie de tomber là-dedans.

Quels sont tes projets pour l’avenir ?
J’ai envie de continuer à travailler avec l’électronique en allant plus loin. Ce que nous avons fait dans ce sens me paraît maintenant un peu timide. J’aimerais bien aussi faire un long métrage en dessins animés sur l’histoire de Pamela Peacemaker.

La scène ?
On propose un vrai spectacle. On travaille beaucoup sur le visuel, les décors, les costumes. On essaie de sortir des attitudes conformes aux stéréotypes des concerts. Le spectacle n’est pas figé, il bouge beaucoup selon les réactions du public. Il est fragile, et c’est aussi ce qui m’intéresse dans ce métier : le fait qu’on soit vraiment sur un fil tout le temps où on est sur scène, toujours à la limite de tomber. Quand on se plante, on se plante. Quand on ne se plante pas, il y a des échanges exceptionnels.

Propos recueillis par J. Touron

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